SATURNE LE MAGNIFIQUE, par Arielle AUMONT

Saturne sait voir avec une lucidité froide, l’enchaînement rigoureux des causes et des effets sur de longues périodes. Cela le sécurise, apaise en partie ses craintes, car il est conscient de pouvoir, dans une certaine mesure, infléchir le cours des événements  De nature inquiète, viscéralement possédé par le doute, le saturnien recherche appui dans les connaissances acquises qu'il teste méthodiquement.


Cet article est paru dans la revue "Urania Magazine", n°14

Du pouvoir temporel à la découverte du pouvoir intérieur : premier pas vers le spirituel


Avec Saturne, le pouvoir est silencieux, intériorisé, l'aspiration s'oriente vers le contrôle de soi, la maîtrise discrète et ferme des situations.

Saturne termine l'ascension sur le plan manifesté, puisque avec lui on passe de l’accumulation à l’essentiel, de l’avoir à l’être.

Il semble qu'avec la fin du Septénaire, la construction de l'être humain soit achevée, que les planètes rapides représentant sa structure psychophysique soient aptes à fonctionner :
  • avec son intelligence Soli-Lunaire-Mercure créant la synergie entre les deux pôles, 
  • avec la dynamique vénusienne, pour savoir "s'unir" aux choses, aux êtres, 
  • avec Mars, pour que les modalités de son verbe "agir" soient en œuvre.
En cette fin de parcours, l'être humain accède à des activités moins rudimentaires (au-delà des fonctions animales de base : alimentation, agressivité, accouplement, auto défense) qui en font sa spécificité, à savoir disposer d'une intelligence de plus en plus structurée, au fur et à mesure de l'intégration progressive des facultés symbolisées par les planètes lentes, ou planètes « Faculté ».

Des saturniens heureux, ça existe…

Être saturnien, c'est avoir les luminaires ou l'Ascendant en Capricorne, c'est encore recevoir sur les luminaires des aspects de Saturne, c'est avoir également Saturne installé à l'Ascendant, au Milieu du Ciel ou de moindre influence en angle.

Être un Saturnien heureux, c'est accepter de grandir, c'est accepter le changement de références qui s'impose au fur et à mesure de la réflexion, c'est accepter d'assurer les conséquences de cette maturation.

Saturne, le sens de la verticale

Physiquement, Saturne correspond au système osseux, aux articulations, à la colonne vertébrale (voûte palatine et calotte crânienne), structures déterminantes lors du travail méditatif, lieu de résonance du AUM qui unifie l'être et éveille la Kundalini.

Le jupitérien fait du jogging, pratique des sports, voyage.. Le saturnien évolué se retire, s'arrête et part avec le mental à la recherche de la perception de la conscience dans la matière. Il œuvre à la conscientisation de cette matière (en utilisant les techniques de méditation.)
Le jupitérien va à l'église pour prier Dieu de lui accorder… Le saturnien équilibré découvre progressivement que son corps est le Temple/Cathédrale, la manifestation concrète de la Conscience/Énergie. Le AUM/Chant grégorien sont l'un des ponts qui relient le plan matériel au plan subtil.

Psychologiquement, l'être découvre la possibilité de se tenir "debout seul", sans le soutien de béquilles familiales, amicales ou celles encore d'idéologies nébuleuses.

Le saturnien sait la solitude qui est la nôtre, de la naissance jusqu'au départ, il assume avec dignité cette connaissance, qui lui donne cette attitude distanciée qui l'isole de la majorité de ses contemporains, qui s'agitent pour ne pas penser, ne pas se retrouver seuls avec eux-mêmes.
Les phases du début de l'intégration des données saturniennes apparaissent souvent dans des blocages, des inhibitions (conjonction, carré et opposition) qui petit à petit se transforment en rigueur, solidité, puissance silencieuse, distante et sereine, quand le sujet accepte de dépasser le stade jupitérien en s'orientant vers la conquête des valeurs intérieures.
Saturne ne fait souffrir que ceux qui s'attachent à l'inutile, possessions matérielles importantes, titres, agitation mondaine, et refusent de se poser les vraies questions, à commencer par la première "D'où venons-nous? Où allons nous?"
Saturne nous demande de stopper la course folle, d'apprendre à écouter la voix intérieure, à ne plus faire confiance aux seules influences extérieures dont se nourrit le jupitérien (ou le neptunien non réalisé.) Il nous demande de commencer à penser par nous-mêmes avec logique et rigueur.

Si Saturne dispose du squelette, il structure par ailleurs le plan intellectuel et "charpente" les œuvres longuement mûries de ses ressortissants, qui présentent des raisonnements parfaitement construits, réduits à l'essentiel, qu'il est très difficile de prendre en défaut.

Instance la plus intellectuelle du septénaire, c'est à lui que nous devons, dans de multiples domaines, nos meilleures "grilles de réflexion" et celle, bien sûr, qui concerne la structure du mental, outil de base du "penseur" qu'il éveille en nous.

Saturne ou le début de la prise de conscience

Le mental renferme tous les secrets de l'univers, toute la connaissance passée, présente et future. Il est constitué de strates qui vont du plus subtil au plus grossier :
  • le conscient dimension concrète, personnelle, état de veille pensée de surface perception du monde extérieur 
  • le subconscient dimension subtile, personnelle, état de rêve tendances mentales mémoire individuelle 
  • l'inconscient dimension causale, collective, état de sommeil profond tendances collectives mémoire cosmique collective 
Le chemin de l'éveil consiste à éliminer progressivement les limites, les voiles qui restreignent le mental, à explorer, développer son potentiel caché et à façonner par degrés ce mental individuel pour en faire un instrument parfait, capable de réfléchir la pure Conscience/Énergie dont il fait partie. On mesure ici l'incomparable apport de l'astrologie qui, avec son décryptage systématique de la structure psychophysique de l'être, permet l'accès direct à nos arcanes intérieurs.

Mais revenons au début du chemin de l'ascension de la montagne intérieure, symbolisée dans le Capricorne par un animal caprin, debout, seul, au sommet

Nuances, nuances…

Il est évident que tout ce que Saturne représente d'achevé ou comme étant en phase d'intégration, ne se manifeste jamais à l'état pur, et que nous devons tenir compte de la globalité du thème. Aussi convient-il de nuancer les interprétations des facettes saturniennes, ce que l'on ne peut réaliser en quelques paragraphes. N'en continuons pas moins notre promenade au long des sentes qui mènent au sommet.

Saturne, le temps, la « Claire-Voyance »

Le saturnien joue avec le temps, qui est son ami. Le passé, le présent, le futur ne lui sont pas étrangers.

"Bouquetin / Ibex" par Yoann Lambert, sur FlickR
  • Le passé lui est familier, grâce à sa logique implacable, c'est avec aisance qu'il remonte le long des chemins dans la mémoire, sa représentation, sous l'aspect d'un vieillard, dit la sagesse immémoriale acquise avec le temps.
  • Dans le présent, son contact avec la réalité se révèle sans faille, sa rigueur d'observation donne au saturnien ce regard froid qu'il pose sur les choses et les êtres, quand, installé en général un peu en dehors du groupe, il écoute et regarde en silence, ne donnant son avis, semble-t-il, qu'à contre cœur, car il le sait sévère et en conséquence susceptible d'être mal accueilli. 
  • Le futur ne lui est pas scellé dans la mesure où celui-ci n'est que la prolongation du présent dont il a fait une analyse précise, et dont, sans difficulté, il peut prévoir le déploiement des éléments. Avec la démarche analytique rigoureuse saturnienne, on a accès à la "claire-voyance » du sage, et non aux flashs brumeux des médiums qui, privés des données saturniennes et dotés d'un Neptune sans repère, errent à tâtons, à la recherche de certitudes évanescentes. 

Certes, on peut obvier les trajectoires, le libre arbitre étant l'apanage de l'être humain, apanage qu'il convient de conquérir et dont Saturne donne la première pierre en laissant entrevoir l’enchaînement probable, afin de prendre les mesures nécessaires.

Saturne sait voir avec une lucidité froide, l’enchaînement rigoureux des causes et des effets sur de longues périodes. Cela le sécurise, apaise en partie ses craintes, car il est conscient de pouvoir, dans une certaine mesure, infléchir le cours des évènements  De nature inquiète, viscéralement possédé par le doute, le saturnien recherche appui dans les connaissances acquises qu'il teste méthodiquement, sa méfiance étant éveillée par la dichotomie qui existe entre les discours officiels et les réalités qui l'entourent. Il lui faut absolument comprendre le pourquoi et le comment de tout phénomène. Il va en conséquence évoluer, au cours de son existence, du doute à la distance avant que ne s'installe sans effort, le détachement, fruit naturel de la démarche.

Le doute, excellent tonique pour la pensée

   "Splash" (détail), par Alex Czarniak
sur http://alex-czarniak.deviantart.com
Le doute et la méfiance sont, d'une certaine façon, les vertus cardinales qui incitent l'individu à réfléchir, et le saturnien, être "concret" par excellence, ne peut se rassurer qu'en vérifiant, "si c'est bien comme cela que ça marche…".

Le Jupitérien accepte sans contester le catalogue "Vie, mode d'emploi" inventé par la société pour assurer sa pérennité. Par certains côtés traditionnalistes, le saturnien s'essaie à suivre les règles établies : on doit vénérer ses parents, travailler, se marier, assurer sa descendance, suivre les règles de la morale laïque et religieuse du pays auquel on appartient, etc. Et tout ira bien, disent-ils! Oui, mais concrètement?

En regardant ce qui se passe autour de lui, notre réaliste sent ses doutes viscéraux mis en alerte. Il s'arrête, s'assoit, s'écarte de la course et commence à se demander à quel moment ça s’est enrayé?

Il "épluche" ses comportements, ses réactions, les conditionnements auxquels il a été soumis, soigneusement, calmement et commence, pour survivre, à inverser les processus. Il ne se laisse plus piéger, prend des distances avec les principes imposés s'ils n'ont pas de fondements solides, réétudie ce qu'on lui a inculqué, et commence, en somme, à se structurer, à se découvrir une pensée propre, à se séparer de ceux qui tournent encore dans les rails du conformisme social "Travail, Famille, Patrie" ou version plus moderne "Métro, Boulot, Dodo, TV, Vacances."

L'inversion des processus primaires constitue la clef d'accès au monde intérieur. On va passer :
  • de la quantité à la qualité,
  • du laisser aller à la discipline,
  • de l'acceptation facile du discours à l'analyse de ce que l'on vous propose,
  • des fêtes et des lumières à la lampe de bureau, compagne des heures d'étude,
  • de la multiplication qui éparpille à l'objet unique qui développe, retient l'attention pour nous apprendre à mieux apprécier,
  • du fugace qui effleure au temps d'approfondissement accordé à une activité, afin de tracer un sillon droit où germera le grain de la pensée.
Le saturnien n'est plus dupe, il a constaté que souvent les théories consensuelles sont fausses, limitées, infantiles, il a démasqué l'inconsistance du "Programme de bonheur, clefs en mains", il s'éloigne "du monde", non douloureusement mais pour être heureux parce qu'il a trouvé un sens à la vie et qu'il entend bien réussir la sienne.

Solitude? Non. Distance pour préserver sa qualité de vie

"Saturn on a medieval stained..."
par Le.Mat, sur 
FlickR
Les proches qui pénètrent encore dans le "Cercle d'or de l'intimité du saturnien" sont rares, triés sur le volet. Il leur faut être capables d'émettre des opinions réfléchies, d'apporter leur pierre à la réflexion. Il ne s'agit plus d'ambiance de fête apportée par la bonne chère et les alcools, de conversations bruyantes et superficielles qui font la matière des réunions habituelles. Le saturnien souffre dans ces milieux, il n'a pas "le sens de la fête" pris dans ce sens là, il s'ennuie mortellement dans ces soirées, d'où cet air sombre, distant, froid qu'arbitrairement on lui prête. Tout être qu'une situation importune est sombre, triste.

Il convient de se sortir des idées toutes faites d'une astrologie primaire, qui décrit les saturniens comme des rabat-joie. Ils accèdent à des plaisirs autres et ils en ont le droit, le terrorisme qui veut que tout le monde s'amuse des même choses doit être écarté. Petit à petit, ils refusent les invitations, sont plus heureux et ne peinent plus leur entourage en leur faisant grise mine dès qu'ils refusent d'être "des otages, au nom de la sacro-sainte sociabilité", otages qui ne savent plus se mettre au diapason de groupe.

La phase d'intégration (cela concerne principalement ceux dont les luminaires sont touchés par Saturne ou qui présentent un Saturne à l'Ascendant.) des données saturniennes peut s'avérer délicate, lorsque la distance, le retrait commencent à s'imposer, entre le sujet, la famille, le groupe.

Cette phase peut paraître à l'intéressé et à ses proches assez déconcertante dans la mesure où, ne pouvant encore se passer de son environnement (on ne change pas en quelques mois des années d'habitudes), il accepte les invitations et se montre de plus en plus désagréable, dans la mesure où il supporte de plus en plus difficilement "des plaisirs" qu'il partage à présent de moins en moins. Les proches ne comprennent pas ce changement d'attitude et renouvellent "pour le sortir de sa tristesse" les invitations, il y vient encore quelques fois, s'y ennuie désespérément, se reprochant âprement d'avoir accepté et de perdre un temps qui aurait été plus heureux à lire, étudier, peindre, écrire, à faire de l'astrologie.

L'éloignement du groupe se fait naturellement, on ne peut être une cellule d'un ensemble que si l'on prend la tonalité de l'ensemble, or, le saturnien, en approfondissant ses recherches, se construit, devient un être pensant, autonome, exigeant, d'une honnêteté fondamentale et par-là même perturbante pour la société.

Son attachement aux traditions, qu'il veut retrouver dans leur essence et pureté première, l'amène à remodeler dans le sens de l'exigence le ronron officiel en lui donnant des formes plus structurées, débarrassées de toute démagogie, qu'il va entendre appliquer avec une grande droiture, se heurtant de ce fait aux compromissions, au laxisme qui huile les rouages des groupes sociaux. Un tel individu "détonne" dans le paysage, il s'exclut de lui-même, empêcheur de tourner en rond puisqu'il se dresse au milieu du courant, érigeant l'honnêteté intellectuelle en règle de vie. Beaucoup renoncent au combat, préférant retourner à "leurs chères études" qui leurs donnent tant de joies et qu'ils n'achèvent jamais, l'horizon de leurs connaissances reculant sans cesse.

Il faut pour faire sortir un saturnien de sa retraite que l'on blesse très fort en lui quelque chose à quoi il croit, que l'on émette à ses yeux une contre-vérité. Alors, à ce moment, que ceux qui ont voulu dépasser certaines bornes se méfient car il va utiliser ses connaissances, qui sont en général solides, son esprit de logique, un sang froid à toute épreuve et une force d'endurance hors du commun pour arriver à ses fins. Avec le temps, son allié, il parviendra à mettre un peu d'ordre et pourra retourner dans le silence qui lui est cher, méditer.

Cette exigence de qualité du travail, le saturnien la vit, ce qui explique la rareté de ses publications. N'étant jamais satisfait de l'état de ses travaux, il refuse de faire connaître ce qu'il pense n'être pas vérifié, revérifié, abouti. De temps en temps, on parvient à lui arracher un livre, qu'il ne lâche qu'en maugréant que "ce texte est déjà dépassé, que sa pensée a déjà évolué."

Problème que l'on ne rencontre pas si les données jupitériennes sont dominantes. Là, les publications sont régulières, ce sont en générales des synthèses/compilations remodelées rapidement sous un titre tapageur, qui reprennent et malaxent des données qui, souvent, dans l'urgence, demeurent tant pour les auteurs que pour les lecteurs incomprises, et qui bien entendu ne seront jamais approfondies.

Avec l'âge, ils accueillent avec sérénité les criailleries du monde ; celles-ci les atteignent de moins en moins, ils savent que l'univers est en gésine, que l'accouchement n'est pas terminé, que la vie s'éveille lentement, qu'il faut du temps, que le bon sens veut que l'on commence par soi-même, qu'Uranus ne pourra délivrer son message que si l'on a déjà bien intégré les données saturniennes.

Saturne, la grâce du détachement heureux

Est-il besoin de rappeler que la plupart de nos peines, de nos chagrins viennent de la non-satisfaction d'un désir. Qu'en conséquence, "le traitement" des désirs nous rapproche de la plénitude heureuse qu'il n'est pas question de nous meurtrir, de nous amputer prématurément d'une part de nous même, mais d'avancer en les éliminant, à notre pas, en douceur, vers une liberté heureuse. "Nous ne sommes riches que de ce que nous ne désirons pas", à méditer!

Les distances, les détachements hâtifs (nourriture, abandon de biens matériels, des revenus, de recherche de titre ) sont toujours voués à l'échec et engendrent des refoulements, des transferts, qui apporteront souffrance, désarroi, sentiment d'impuissance, de honte, de dégoût de soi-même, bloquant ainsi pendant un certain temps toute possibilité d'évolution.

Seule la lucidité nous guérit de tout

"La liseuse de rue" par sevenoled34 sur FlickR

Elle œuvre en silence et le détachement/cadeau est donné par surcroît, à un moment où souvent on s'y attendait le moins.

Le détachement que l'on s'impose prématurément ne peut être que momentané, il tient exclusivement sur une crispation de la volonté et la crampe est proche.

La sagesse, pour se dégager d'un désir, veut qu'il soit désamorcé, par une réflexion qui en démontre, l'inanité ou le peu de saveur. Si l'envie persiste, il n'y a plus qu'à passer à la pratique avec l'œil bien ouvert!

Oui j'ai envie de cela! Eh bien! Pour m'en sortir, je me l'accorde, et avec lucidité, je me regarde, dégustant la chose, et je me pose des questions : est-ce aussi bon que je le pensais? Y-a-t-il un bon rapport "qualité-prix" ? Risques pris, investissement financier, temps…

Que ce soit pour une voiture, un pull, des vacances, une histoire amoureuse, un gâteau, un poste représentatif, si la réponse est positive, il convient de continuer jusqu'à satiété, c'est la satiété qui guérit définitivement sans refoulement, avec éventuellement des rechutes de plus en plus rares.

 
La réussite du "traitement" tient :
  • à la rigueur des questions qui doivent cerner au plus prêt et dans les détails "les modalités de la satisfaction du désir en cours d'élimination",
  • bien sûr, à l'honnêteté des réponses que l'on se fait pour cet exercice ; les saturniens sont parfaitement équipés en raison de la logique et de la rigueur de leur raisonnement.
Une réserve s'impose, ce traitement n'est pas à conseiller à des jupitériens purs ou à des neptuniens, cela ne leur servirait à rien et au contraire ne pourrait qu'aggraver leurs difficultés naturelles.

La cure faite, le détachement sera acquis définitivement, il ne sera plus basé sur une crispation mentale prête à rebondir mais sera le "symptôme positif' qui dira la réussite de l'éradication d'une tendance qui fût la nôtre, mais dont nous avons su nous libérer. Nos qualités et nos dons n'ont pas d'autres origines. Le détachement concrétise une liberté heureuse par rapport à quelque chose qui a perdu de la valeur à nos yeux, une légèreté, et non une privation douloureuse. Un saint qui n'est pas joyeux n'est pas un saint.

Sans aller si loin, ayons le Saturne gai, c'est possible quand on sait s'en servir.

Halte à la vision nécessairement douloureuse de la rédemption

Il faut que cessent les connotations grisâtres et sinistres attachées à Saturne, le côté maladif et sombre, la solitude vécue douloureusement, la souffrance rédemptrice, les austérités nécessaires à l'accès à la vie spirituelle.

Tous ces vieux leurres ne sont plus crédibles, la vie spirituelle ouvre sur l'harmonie, la joie, la splendeur, comment pourrait-elle se manifester, s'épanouir dans un corps exsangue, abritant un intellect diminué par des privations absurdes, des ascèses qui annihilent ou diminuent les facultés intellectuelles?

Deux grandes voies s'ouvrent à ceux qui cherchent.

Le jupitérien demande son salut à un dieu extérieur à lui. Avec Saturne, la démarche est tout autre, intériorisée. Le saturnien cherche en lui "la Divinité", c'est, pense-t-il, en dissipant les voiles des tensions qu'il accédera à l'Impensable vibration, à la lumière.

La plupart des auteurs anciens, et ceux qui les suivent, encore prisonniers des notions jupitériennes d'un dieu tonnant qui exige un paiement pour les fautes, se sont attachés à ne dépeindre que le début de l'intégration qui se fait à partir des Conjonction/Carré/Opposition, quand l'être n'en est qu'à l'aurore de sa route vers la conquête de la verticale. Leur vision erronée de la rédemption, obtenue seulement par les souffrances, les renoncements, les mutilations physiques ou psychologiques, ne fait que témoigner de leurs difficultés personnelles non résolues.

D'où cette approche constamment négative et désastreuse de la dernière planète visible à l'œil nu, dernier repère tendu vers l'invisible dont ils n'ont pas compris la plénitude du message silencieux. L'évolution actuelle pose différemment les questions. Une véritable demande spirituelle se fait jour, et Saturne, correctement perçu, peut apporter les réponses dans la mesure où il représente la première marche qui permet d'approcher les données uraniennes et neptuniennes sans dommage.

Saturne représente pour nous le bâton de pèlerin (la colonne vertébrale, physique et psychologique) nécessaire pour cheminer vers l'invisible. Qu'il soit remercié !

Ne pas prendre des vessies pour des lanternes

"Road of no return", par Criss Mihaescu 
sur http://criss.site.voila.fr
Même si la lanterne ressemble à celle de l'Ermite, la confusion peut être désastreuse. Saturne peut être dangereux pour les âmes fragiles (luminaires ou Ascendant en Poissons ou en conjonction, carré ou opposition à Neptune) en raison de ses tendances exigeantes qui précipitent certains adeptes de la voie intérieure mal orientés, dans des excès déstabilisants, qui aboutissent à des échecs douloureux.

Un exemple, un aspect de conjonction, carré ou opposition à Saturne-Lune au natal signale souvent un rapport mère/nourriture perturbé, qui se traduit, parfois, par une attirance pour les techniques de jeûne, ce dernier étant en général envisagé sur un transit ou des aspects de conjonction, carré ou opposition à Saturne-Lune qui réactive le problème.

Celui/celle qui se précipite dans "un jeûne purificateur" oublie que le cloaque à récurer en premier est le mental, que c'est à ce niveau que doit commencer le vrai nettoyage. Le jeûne des pensées erronées est bien plus important qu'un jeûne physique qui ne fait souvent qu'enfler l'ego (ce n'est pas tout le monde qui jeûne 40 jours qu'elle prouesse! Je, je, je… ), quand il ne porte pas atteinte plus ou moins gravement à la santé. Quand le mental est "purifié", c'est à dire quand la prise de conscience de la conjonction, carré ou opposition à Lune-Saturne est résolue, l'idée de jeûne a disparu. Le résultat apparent, en dehors de l'harmonisation de la relation mère/enfant/nourriture, se vérifie dans la transformation du refus/boulimie (deux manifestations du même problème) en goût pour une nourriture frugale, raffinée, légère, odorante, en résumé délicieuse.

Autre exemple, les sectes où les adeptes se dépouillent de tous leurs biens, rompent les liens familiaux et jouent sur ces données mal comprises de dépouillement et de retrait. Une étude des thèmes de leurs victimes fait régulièrement apparaître des données saturniennes mal intégrées, n'endiguant pas des aspirations spirituelles neptuniennes qui partent à la dérive.

La meilleure façon de lutter contre les sectes est de faire comprendre la véritable dynamique saturnienne à ceux qui sont tentés d'entrer dans ces groupes où il leur est demandé des renoncements qui, s'ils correspondent à première vue au discours familier judéo-chrétien qui marque notre enfance, n'en sont pas moins dangereux.  

Parfois un célibat offensant pour les autres

Le terrorisme social qui veut que l'on vive en couple, pèse lourdement sur les jeunes et les moins jeunes ressortissants saturniens, qui aimeraient pouvoir être eux-mêmes sans avoir à répondre de leur inclination ou de la lucidité qui les porte vers le célibat.

"Crustáceo decápodo - 01"
par Banco de Imágenes Geológicas, sur 
FlickR
Célibat qui inquiète tout le monde, et la famille en particulier, qui ne cesse de s'interroger et guette avec persévérance un frémissement qui laisserait espérer que le dissident(e) va enfin "faire une fin" ou de nouveau se "recaser" s'il y a eu un divorce, expressions qui, en elles-mêmes, font frémir et glacent.

 Le saturnien n'est pas fondamentalement "contre la vie en couple" mais il sait, par expérience, son exigence, ce qu'il attend de l'autre, ce qu'il peut donner, ce qu'il ne supportera pas à savoir les concessions qu'il appelle, lui, des compromissions. Il sait qu'il ne se résoudra pas à la médiocrité aussi se garde-t-il de s'engager tant qu'il n'a pas trouvé celle/celui qui pourra répondre à ses critères, sa quête peut durer longtemps, toute une vie. Cela ne l'attriste pas car il sait qu'il serait malheureux dans un couple dissonant.

Si, par inadvertance, il se laisse, l'espace d'un moment, troubler et mener devant Monsieur le Maire, dans des conditions ne correspondant pas à ses vœux, il choisira, s'il possède un Uranus en phase d'intégration, le divorce ou s'il n'a pas suffisamment de ressort, le repli, il vivra seul à l'intérieur du couple, silencieux, organisant sa vie sans partage aucun avec le conjoint. On peut être marié et célibataire.


De l’évolution lente des saturniens

L'évolution saturnienne, en général assez lente, peut se faire plus rapidement pour ceux qui pratiquent l'astrologie puisqu'ils connaissent ce qui leur est demandé, ce à quoi il convient de réfléchir quand un transit du seigneur du Septénaire vient caresser un point sensible de leur thème.

Au lieu de résister, de refuser, de s'accrocher, il leur est plus facile de s'abandonner, d'accepter ce qui se passe et d'œuvrer dans le sens de l'accélération du processus afin d'en être libéré au plus tôt pour en recevoir les fruits, qui sont toujours dispensés largement. Quand on travaille avec l'infini, la récompense dépasse toujours l'effort consenti.

Les transits de Saturne nous guident vers l'essentiel, ils élaguent les possessions, les attachements, les peurs aussi, et, quand nous avons eu le courage d'abandonner quelques béquilles, nous découvrons en nous, la confiance, la solidité que nous cherchions en vain au dehors.

Saturne, avec l’âge, fait de nous des épées de lumière

Saturne donne l'opportunité à ses ressortissants qui "l'écoutent" de bien vieillir. Les vieillards secs, alertes, à l'œil vif, qui se tiennent droits témoignent d'un Saturne bien intégré (ne pas oublier que tout uranien possède aussi en héritage les données saturniennes) qui les a inspirés au long de leur existence.

Un Saturne vécu harmonieusement permet de connaître tous les âges et de les conserver vivaces en nous. Demeurent en nous l'enfant, l'adolescent et l'adulte. L'axe Cancer-petit enfant/Capricorne-grand âge est celui de la mémoire de toute une vie. L'évolution propose de ne pas nous attarder, de ne pas nous figer à un âge quelconque, l'achèvement de l'être ne pouvant se réaliser qu'à travers "un parcours complet" qui, en nous faisant traverser les âges, nous enrichit d'expériences de plus en plus raffinées, du jeu de la marelle à celui des spéculations intellectuelles qui nous amènent à prendre conscience de l'essence de choses.

L'essentiel qui manifeste ce qui est le meilleur ne peut être atteint qu'après avoir éliminé la mousse, les lichens, les fausses routes, les illusions, et cela la jeunesse ne peut y prétendre, en dehors de "vieilles âmes" mais ceci est une autre histoire (lorsque Saturne est puissant dans un thème, on peut penser avoir affaire à quelqu'un qui a déjà fait un certain chemin.)

Refuser de vieillir, c'est stagner à la phase du paraître, des données extérieures, n'exister encore que pour séduire, c'est à dire tenter naïvement de se rassurer dans le regard des autres. Selon l'axe Cancer-Capricorne, nous passons des rondeurs lunaires à la vérité de la structure osseuse qui apparait dès que les chairs se vident de leur eau, laissant place aux rides d'expression qui disent si bien nos attitudes mentales les plus constantes et, par la même, la couleur intérieure. La beauté n'a pas d'âge, l'âge fait seulement apparaître la structure profonde. Si nous ne pouvons rien sur la structure osseuse, nous pouvons, en modifiant nos pensées, modifier nos rides d'expression. Accueillir Saturne et les premiers cheveux blancs, les premières rides qui rendent les visages expressifs, c'est savoir orienter sa vie vers des valeurs plus profondes, plus intérieures, qui embellissent l'être, l'équilibrent et lui donnent la véritable sécurité, la conscience d'être.

Il faut redresser encore une fois la barre qui veut que Saturne soit déchéance et amenuisement. Il ne l'est gravement que lorsque l'on ne respecte pas une hygiène de vie physique et mentale stricte. Lorsque nous cheminons à son écoute, il nous chausse de sandales de vent, nous allège, nous débarrasse de désirs enfantins souvent compensatoires, et met dans nos cœurs toute la compréhension, toute l'indulgence, toute la tendresse que nous voyons dans les regards de ceux qui ont longuement, pleinement vécu et que la sagesse éclaire.

Nous pouvons en vivant complètement Saturne devenir le havre, le refuge, la parole qui rassure la jeunesse qui erre à la recherche de sa voie.

Résister à Saturne, c'est résister à être. Nous ne pouvons que lui répondre oui, chaque fois que, lors d'un transit, il nous interpelle pour nous préparer à recevoir et à comprendre Uranus.